Gabon Matin vous livre l’allocution d’Ali Bongo au débat général de la 75e session de l’assemblée générale des Nations-Unies.
Monsieur le Président
Majestés,
Mesdames et Messieurs les Chefs d’État et de Gouvernement, Mesdames et Messieurs les Chefs de Délégation,
Monsieur le Secrétaire Général, Mesdames et Messieurs,
Monsieur le Président,
Permettez-moi à l’entame de mon propos, de vous adresser mes vives félicitations pour votre brillante élection à la Présidence de cette 75ème Session de l’Assemblée Générale des Nations Unies.
J’y vois un témoignage éloquent du rayonnement de la diplomatie de votre pays et la traduction de sa haute considération par la Communauté internationale.
Je puis vous assurer du plein soutien du Gabon tout au long de votre mandat.
Je voudrais saluer le travail accompli par votre prédécesseur le Professeur Tijjani MUHAMMAD-BANDE qui, dans un contexte sanitaire particulièrement difficile, a su mobiliser les efforts de nos États afin de conduire notre agenda.
J’exprime également toute mon appréciation au Secrétaire Général, Monsieur Antonio GUTERRES, pour l’ampleur du travail réalisé dans le renforcement de l’efficacité de notre Organisation et pour son engagement à mettre en œuvre les courageuses réformes structurelles que l’ONU a amorcées.
Monsieur le Président
Le monde est aujourd’hui à un tournant de son histoire. Nous sommes, en effet, en plein milieu d’une crise sanitaire sans précédent, qui déstructure nos sociétés et dont le bilan affecte chaque Nation.
En effet, la pandémie de la COVID-19 a contribué à amplifier les défis politiques, sécuritaires et socio-économiques auxquels nos États sont régulièrement confrontés.
Aussi devrions-nous tirer les enseignements de cette crise multiforme.
D’emblée, l’un des constats qui s’impose à nous est notre interdépendance face à toute menace contre la chaîne de l’humanité dont nous sommes tous des maillons.
Cela nous rappelle que la seule voie de salut est le multilatéralisme et plus de solidarité internationale.
C’est à l’aune de cette réalité que les Pères Fondateurs de notre Organisation, ont bâti le socle conceptuel de la sécurité collective qui est au cœur de la Charte des Nations Unies.
Une autre évidence qui se dégage de ce contexte de crise, est l’insuffisance d’un cadre normatif pour faire face aux défis globaux qui se posent à notre monde.
Aussi, devrions-nous, nous réinventer et agir plus efficacement pour contenir les menaces transnationales et transfrontalières, à l’instar de la pandémie actuelle.
Au moment où le concert des Nations célèbre les 75 ans d’existence de l’ONU, notre maison commune, nous devons être à la hauteur des valeurs et des idéaux qui ont guidé sa création.
C’est le lieu de se féliciter de l’importante Déclaration adoptée à l’occasion de la Commémoration du 75ème anniversaire de l’ONU.
Celle-ci reflète significativement l’ampleur de la tâche qui nous incombe, et la mesure des engagements à prendre et des actions à entreprendre afin que personne ne soit laissé en marge.
Monsieur le Président
La thématique de nos travaux est d’une portée particulièrement pertinente et opportune. En effet, « L’avenir que nous voulons, l’ONU qu’il nous faut : réaffirmons notre attachement au multilatéralisme » sont des termes forts qui interpellent nos consciences respectives.
En effet, les Nations prises individuellement ne sauraient se mettre à l’abri du dérèglement climatique, des tensions liées à la concurrence des échanges commerciaux, à la montée des inégalités, à la multiplication des attentats terroristes et des actes de criminalité transnationale.
Le monde dans lequel nous vivons, a besoin d’un système multilatéral qui impulse une coopération au bénéfice de tous et à une mutualisation de nos efforts.
A cet égard, la réforme du Conseil de Sécurité de l’ONU qui intègre une représentation équitable en son sein et une amélioration de ses méthodes de travail, se révèle comme une nécessité voire une exigence.
Le Gabon, par ma voix, reste fondamentalement attaché à la position commune africaine, telle qu’exprimée par le Consensus d’Ezulwini et la Déclaration de Syrte.
Parallèlement à plus de solidarité internationale et à la réforme attendue du Conseil de Sécurité de l’ONU, la revitalisation des travaux de l’Assemblée Générale ainsi que la réforme du Conseil Économique et Social de l’ONU (ECOSOC), doivent également être menées en vue d’impulser une dynamique nouvelle à notre Organisation.
Monsieur le Président,
Les Nations Unies qu’il nous faut, sont également tributaires d’une redéfinition des missions assignées aux Institutions de Brettons Wood, afin d’en faire de véritables moteurs du développement et de la croissance mondiale.
Ces réformes, sont indispensables à l’émergence d’un ordre international plus juste, prônant au mieux les intérêts de tous, car elles impactent la réalisation de plusieurs Objectifs de Développement Durable à l’horizon 2030, y compris la réponse aux légitimes aspirations des Peuples africains contenues dans l’agenda 2063.
Monsieur le Président,
Les Nations Unies ont tout naturellement vocation, à être une réponse des Peuples du monde face aux menaces à leurs aspirations de dignité, de paix et de prospérité.
Les Nations Unies doivent ainsi être la réponse de l’humanité contre la fatalité et l’injustice.
L’exigence d’action pour un système multilatéral plus juste et équitable, a pour corollaire la nécessaire stabilisation des cours des matières premières, qui sont soumises à une spéculation excessive.
Celle-ci est source d’instabilité difficilement compatible avec la prévisibilité des ressources mobilisables, dont nos pays ont tant besoin pour la réalisation de leurs objectifs de développement.
Dans la même dynamique, une justice plus équitable consisterait sans doute, à rétribuer les pays qui disposent de matières premières, le juste prix de leurs ressources naturelles.
L’avenir que nous voulons exige également le respect des engagements souscrits.
C’est le lieu pour moi de rappeler l’urgence de concrétiser ces engagements pris en faveur des pays en développement.
Que ce soit en matière de transfert de technologies « propres » et d’amélioration de l’accès des peuples à l’énergie renouvelable.
Il s’agit pour nous d’accélérer leur passage d’une industrie traditionnelle à consonance polluante à une industrie décarbonée, respectueuse de l’environnement.
Pour le Gabon, celui-ci repose résolument sur un socle constitué de trois piliers : l’amélioration du cadre de vie, la mise en œuvre des projets d’adaptation aux changements climatiques et la préservation de la biodiversité.
Monsieur le Président,
Tout développement ne saurait être durable sans paix, ni sécurité et sans stabilité. Malheureusement, ces fondamentaux continuent à être mis à mal dans plusieurs régions du monde.
Les attaques terroristes récurrentes nous révèlent qu’aucune Nation n’est à l’abri de cette menace pour laquelle notre réponse doit être fondée sur une franche coopération à l’échelle locale, nationale, régionale et globale.
Bien évidemment, le Gabon, par ma voix, solidaire de la Communauté internationale, condamne le terrorisme sous toutes ses formes et manifestations et apporte son soutien aux pays et aux peuples qui en sont victimes.
Monsieur le Président,
Le prix de l’instabilité conjugué aux effets du terrorisme, des foyers de tension et des déstabilisations multiformes, est particulièrement lourd pour de nombreux pays africains.
En effet, ils se trouvent contraints de consacrer d’importantes ressources à ces phénomènes entretenus, entre autres, par le commerce illicite des armes légères et de petit calibre et le trafic des espèces de faune et de flore sauvages.
Il est évident, pour moi, que dans le combat contre ces sources d’instabilité et de fragilité dans plusieurs régions de notre Continent, une approche globale et solidaire s’impose car
« toute menace contre une Nation constitue tout naturellement une menace contre tous. »
A cet égard, nous demeurons résolument engagés aux côtés des Nations Unies, de l’Union Africaine, comme au sein de la Communauté Économique des États de l’Afrique Centrale (CEEAC), à œuvrer à la promotion de la stabilité et de la paix dans nos États.
Monsieur le Président,
Au plan régional, j’ai reçu de mes Pairs, le mandat de conduire la Réforme Institutionnelle de la CEEAC, en vue de rendre notre Communauté, plus efficiente afin qu’elle relève les défis pour lesquels elle a été créée, notamment ceux relatifs à l’Intégration Régionale et au Développement.
Le 28 juillet 2020, la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de la CEEAC a adopté une nouvelle nomenclature organique plus dynamique et plus opérationnelle, en vue de répondre aux défis majeurs de l’heure, notamment la paix, la sécurité et le développement.
A cet effet, le Traité révisé de la CEEAC est entré en vigueur le 28 août 2020 et la Commission de la CEEAC, nouvel Organe Exécutif de notre Organisation communautaire, a été mise en place le 31 août 2020, à l’issue de la prestation de serment de l’ensemble de ses membres.
Lors de son 17ème Sommet Ordinaire, la CEEAC a également procédé à l’adoption d’un Plan d’action communautaire pour la mise en œuvre de la Résolution 1325 des Nations Unies, de la stratégie communautaire en matière de riposte à la COVID-19.
Elle a aussi procédé à l’harmonisation des règles relatives aux télécommunications, aux technologies de l’information et de la communication, à la cyber sécurité et à l’interconnexion transfrontalière.
Monsieur le Président,
Au plan national, le Gabon, à l’instar de nombreux pays, a subi l’impact de la baisse drastique des cours des matières premières, accentué par les effets de la pandémie de la COVID-19. Une situation qui a conduit au ralentissement de son activité économique.
Dans ce contexte, mon pays a poursuivi les réformes engagées, pour résorber les déséquilibres à travers des mesures de relance qui consacrent l’ajustement budgétaire, le développement des infrastructures et la promotion du secteur privé comme leviers de la diversification et de la transformation de notre économie.
Aujourd’hui, nous pouvons nous réjouir des signaux encourageants qui se dégagent de la mise en œuvre de notre Plan de Relance de l’Économie.
En effet, grâce au retour de la croissance impulsée par ces réformes, le Gabon retrouve progressivement des marges de manœuvre.
Celles-ci sont nécessaires au financement des investissements les plus urgents, notamment en matière de Santé, d’Éducation, de Formation, d’Emploi et d’Infrastructures.
Monsieur le Président,
L’inclusion est une préoccupation majeure dans l’orientation politique de mon pays.
C’est toute la portée du programme politique pour « l’égalité des chances », que j’impulse en faveur d’un développement plus juste et équitable, revalorisant les femmes, les jeunes, les personnes les plus vulnérables, afin que personne ne soit laissé en marge du développement de mon pays.
C’est dans cet élan, qu’il m’a été donné de nommer récemment une femme aux fonctions de Premier ministre, Chef du Gouvernement. Ainsi, trois dames de grande valeur, parmi de nombreuses femmes de qualité, occupent désormais de très hautes responsabilités au Sommet de l’État.
C’est le cas notamment à la Cour Constitutionnelle, au Sénat ainsi qu’à la Primature Elles sont d’un apport inestimable à la consolidation de nos acquis démocratiques et de notre marche vers le progrès.
Monsieur le Président,
L’avenir que nous voulons et l’ONU qu’il nous faut resteront des vœux pieux tant que de nombreux peuples et des êtres humains demeureront en proie au fardeau de sanctions iniques et souvent injustes.
Je voudrais, à cet égard, réitérer l’appel solennel pour la levée totale de l’embargo qui frappe Cuba depuis plusieurs décennies pour permettre à ce pays de réaliser les Objectifs de Développement Durable.
Je ne saurais clore mon propos, sans réaffirmer l’attachement du Gabon au multilatéralisme, seule voie dans notre légitime quête d’un avenir en confiance, et dans notre ambition commune de bâtir une Organisation qui fera face aux enjeux complexes du développement durable.
En définitive, une Organisation qui trouve les solutions appropriées et pérennes aux défis et menaces qui se posent à l’humanité.
Je vous remercie.