Dr. Chislain Moupebele Makadjoka a soutenu avec une mention spéciale et les félicitations du jury sa thèse de doctorat en Histoire Economique à l’Ecole des Hautes Etudes de Sciences Sociales de Paris, intitulée : « Le Gabon, la France et la Banque des Etats de l’Afrique centrale, 1959-1992 : entre logique ’’géomonétaire’’ et ’’financement de l’économie’’ ». L’impétrant qui s’est entretenu avec Gabonmatin a été lauréat de la bourse de la mission historique de la banque de France (2015-2018)
Interviewé par Gabonmatin sur la méthode scientifique utilisée pour ses recherches doctorales, le chercheur gabonais s’est expliqué en ces termes : « Nous avons défini une méthode qui ne permette de saisir le processus de politisation ou de dépolitisation de la Banque centrale et de voir que plusieurs facteurs interagissent pour rendre marginale la problématique de la souveraineté monétaire et légitiment le principe de souveraineté collective et concertée. Pour cela, nous considérons trois échelles d’analyse : nationale (Gabon), régionale (BEAC et zone franc) et multilatérale (relation avec la France et les institutions de Bretton Woods »).
La reconstruction de ces interactions a-t-il ajouté, « nous a permis de comprendre que la politique monétaire menée par la Banque centrale obéit à des conditionnalités qui échappent à la rationalité économique. De fait, nous montrons que les États se sont inscrits dans un processus d’adaptation des institutions et d’appropriation dans un contexte post-colonial en essayant de garantir la crédibilité politique d’un régime monétaire incompatible avec les objectifs de financement de l’économie réelle au Gabon et en Afrique centrale ».
Dr. Moupebele Makadjoka soutenant publiquement sa thèse de doctorat
Au cours de la soutenance publique de sa thèse de doctorat, le chercheur gabonais Dr. Moupebele Makadjoka a affirmé : « Créée en 1973, la Banque des États de l’Afrique centrale est le résultat des transformations institutionnelles qui jalonnent les dynamiques économiques et politiques que connaissent les États dont elle a la charge d’assurer l’émission monétaire. Lorsqu’en 1955, le gouvernement français met en place l’Institut d’émission d’Afrique équatoriale et du Cameroun, il entend dissocier les fonctions d’émission de la monnaie de celles de crédit ».
Selon cet objectif, a expliqué le spécialiste d’histoire économique, « la nouvelle institution monétaire a pour mission cardinale de garantir la stabilité monétaire en ayant pour cible l’inflation et la défense du taux de change. Ses activités commerciales sont limitées. Elle n’accorde que des crédits à court terme, tandis que les crédits à moyen et long terme sont désormais fournis par la Caisse centrale de la coopération économique (CCCE). Lorsqu’en 1959, au moment des indépendances, l’institut d’émission devient la Banque centrale des États d’Afrique équatoriale et du Cameroun, les missions et les paradigmes n’ont que très peu évolué, alors que la question du financement de l’économie devient centrale au Gabon comme dans d’autres États postcoloniaux. »
Le jeune chercheur exprimant sa gratitude à sa directrice de thèse Laure Quennouëlle-Corre, directeur de recherches, CNRS-CRH.
Les débats et les négociations qui s’instaurent dès la fin des années 1960 a relevé le natif de Mambonga (Louétsi-Bibacka, sud du Gabon) « visent à déconstruire le cadre théorique de la politique monétaire et du crédit de la Banque centrale fédérale et aboutir à une forme d’organisation qui permette de combiner les objectifs d’africanisation, de croissance et de stabilité monétaire. L’objectif de notre recherche est de se situer dans ce processus, en se concentrant en particulier sur les enjeux politiques, économiques, géopolitiques (géomonétaires) et financiers qui entourent les relations monétaires franco-gabonaises. Nous avons étudié les pratiques des banquiers centraux, les relations de pouvoir au sein du gouvernement de la Banque centrale, les rapports de force entre États au sein de son Conseil d’administration, le cadre théorique de la politique monétaire et l’impact de ces différents paramètres sur la politique budgétaire et l’évolution de l’économie réelle au Gabon ».
Le jury de soutenance doctorale présidé par Rémy Bazenguissa-Ganga, directeur d’études, EHESS-IMAF (président) était composé de : Laure Quennouëlle-Corre, directeur de recherches, CNRS-CRH (directrice de thèse) ; Olivier Feiertag, professeur d’histoire économique à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (rapporteur) ; Bertrand Blancheton, professeur de sciences économiques, Université de Bordeaux (rapporteur) ; Jean Pierre Bat, docteur en histoire contemporaine, PSL-IMAF André Straus, directeur de recherches émérite, CNRS.