La machine à tricher du PDG prive Estelle Ondo de la victoire au premier tour


Estelle dénonce lors de son vote le dimanche dernier à Oyem Crédit photo : © 2018 D.R.

Estelle Ondo n’aura pas réussi son pari de remporter les législatives dans le 2e arrondissement d’Oyem dès le premier tour. La ministre candidate indépendante faisait face à son principal adversaire, Menié M’Eyi, candidat du PDG, parti au pouvoir au Gabon depuis 1968. Ce dernier a bénéficié des moyens et de la logistique du parti au pouvoir, une machine électorale bien rodée depuis plus de 40 ans. « Une machine à tricher », accusent les entourages des candidats concurrents, étonnés par les tendances et les résultats de ce premier tour dans le 2e arrondissement.

Dans l’entourage de la Ministre, par exemple, on n’hésite pas à parler de fraudes face à certain faisceau d’indices troublants. Dans le quartier de Nfoul, non loin de l’aéroport d’Oyem, le bureau de vote était tenu par les membres d’une même famille, proche de Vincent Engouanga, alias Eboué, baron local du PDG et lui-même candidat à la mairie d’Oyem. C’est ce dernier qui a ordonné l’ouverture du bureau de vote, tôt dans la matinée, sans attendre les représentants des autres candidats. Dans la journée, selon des témoignages concordants, « il a fait au moins six tours au même bureau de vote. »

Le dépouillement dans ce bureau fait apparaître une différence de près d’une centaine de voix en faveur du candidat Menié M’Eyi. C’est le plus grand écart de voix enregistré entre le candidat du PDG et Estelle Ondo. Lors du dépouillement, les représentants des différents candidats ont failli en venir aux mains, en découvrant les liens de parenté des principaux coordonnateurs du bureau.

Un peu plus loin dans le centre de vote de l’école « Ondo et fils », la candidate indépendante s’est vue annuler près d’une centaine de voix à cause de doublons dans les enveloppes ou par manque de signature sur les bulletins de vote. D’autres bulletins ont été annulés dans différents centres. Un vrai coup dur pour la ministre de l’Industrie qui a vu son avance importante se réduire en peau de chagrin.

Le très grand nombre de doublons dans les enveloppes pose question. Certaines personnes se seraient-elles ingéniées à bourrer des enveloppes non fermées pour les faire invalider lors du dépouillement ? Manque d’expérience ou pas, des représentants de la candidate ont refusé de signer des procès-verbaux, estimant qu’ils ne reflétaient pas la réalité du comptage des bulletins. Ils auraient été tripatouillés. Leur refus de signer n’invalide pas les procès-verbaux.

A Oyem, les langues se délient pour parler de la « générosité » des barons locaux du parti au pouvoir. La veille et le jour du vote, des habitants ont reçu des billets pour les inciter à voter pour les candidats du PDG à la mairie et à l’assemblée nationale. Une pratique qui a de beaux jours devant elle. « Pour des modiques sommes, des électeurs vendent la ville à des irresponsables, » s’énerve un Oyémois (Ndlr : habitant d’Oyem).

Au lendemain du premier tour, Oyem était calme dimanche. Un calme apparent, la bataille entre Estelle Ondo, arrivée selon les estimations (33%) en première position et Menié M’Eyi, deuxième (30%), risque de cristalliser les tensions.

Patrick Mba