La FAO alerte sur des risques de pénuries alimentaires en Ukraine


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Des pénuries alimentaires sont prévues immédiatement ou dans les trois prochains mois dans plus de 40% des cas en Ukraine, a mis en garde mardi l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).

De son côté le Programme alimentaire mondial ( PAM ) indique qu’environ 45% des personnes affectées par le conflit s’inquiètent de ne pas avoir assez à manger.

Alors que l’Ukraine reste le grenier agricole et notamment des céréales, des résultats préliminaires d’une évaluation rapide des besoins de la FAO indiquent que des pénuries alimentaires sont pourtant attendues immédiatement ou dans les trois prochains mois dans plus de 40% des cas.

Selon cette enquête basée sur les résultats de 19 oblasts, l’approvisionnement et l’accès à la nourriture sont un problème important dans tous les secteurs commerciaux.

Pourtant, les préoccupations immédiates en matière de sécurité alimentaire découlant de l’offensive militaire en cours sont surtout liées à un défi de l’accès à la nourriture. Car selon l’agence onusienne, les stocks de céréales disponibles en Ukraine représentaient environ 114% de la demande annuelle estimée avant la récente escalade.

Un Ukrainien sur cinq utiliserait déjà des stratégies d’adaptation alimentaire

Dans ces conditions, les hostilités en cours ont provoqué « d’importantes perturbations des chaînes d’approvisionnement et des marchés dans toute l’Ukraine  ». Cela est en train d’entraîner des « déficits de consommation dans des endroits où les gens ne peuvent pas accéder aux marchés pendant plusieurs jours consécutifs, même lorsque la nourriture est disponible » dans les supermarchés.

Ces problèmes sont encore aggravés par la perte des moyens de subsistance et de l’accès aux sources de revenus essentielles. Il s’agit notamment des pensions et des filets de sécurité sociale fournis par le gouvernement, en particulier dans les zones où les forces de la Fédération de Russie sont fortement présentes, comme dans l’est de l’Ukraine.

Selon la FAO, une telle situation affecte « considérablement » le pouvoir d’achat et la sécurité alimentaire de la population. Plus largement, l’alimentation est l’une des trois principales préoccupations des personnes touchées, selon le Programme alimentaire mondial (PAM), estimant qu’environ « 45% d’entre elles s’inquiètent de ne pas avoir assez à manger ». Outre la nourriture, les deux autres principales préoccupations des personnes touchées par le conflit sont la sécurité et le carburant pour le transport.

Selon le PAM, une personne sur cinq utiliserait déjà des stratégies d’adaptation alimentaire depuis le début du conflit. Il s’agit ainsi de réduire la taille et le nombre de repas consommés, manger moins de nourriture et sacrifier des repas pour que les enfants puissent avoir accès à une nourriture suffisante.

Une sécurité alimentaire plus liée à l’accès à la nourriture et non à sa disponibilité

Considérée comme une puissance céréalière, la dimension immédiate de la sécurité alimentaire de ce conflit est liée à l’accès à la nourriture et non à sa disponibilité. « Actuellement, il n’y a pas de problème significatif de disponibilité des cultures de base en Ukraine », a détaillé pour sa part le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU ( OCHA ).

Dans son dernier rapport de situation, l’OCHA rappelle qu’au début de la guerre, les stocks de céréales disponibles en Ukraine représentaient environ 114% de la demande annuelle, principalement en raison du niveau élevé des stocks de maïs.

Le 9 mars, le gouvernement ukrainien a acheté l’équivalent d’une année de consommation nationale de céréales auprès d’agriculteurs et de commerçants afin de renforcer les stocks publics existants. L’OCHA estime que cela équivaut à une année de consommation nationale, soit environ 4,3 à 5 millions de tonnes métriques de blé.

En attendant, les principales villes sont encerclées et continuent de subir des bombardements intensifs, laissant les populations isolées et confrontées à de graves pénuries de nourriture, d’eau et d’énergie.

« Comme l’insécurité persiste et que les chaînes d’approvisionnement locales et nationales sont perturbées, les gens risquent de tomber plus profondément dans des niveaux d’urgence de faim et de malnutrition  », a dit l’OCHA dans son rapport de situation.

Sur la superficie totale des terres, les deux tiers sont agricoles, selon la FAO

Les oblasts de Donetsk et de Louhansk restent l’épicentre de la crise humanitaire en Ukraine. Mais la situation humanitaire à Marioupol reste « l’une des plus grandes priorités et l’un des plus grands défis de la réponse  ».

Contrairement à d’autres endroits durement touchés, comme Kharkiv, Kyïv, Odesa, Dnipro et Sumy qui peuvent encore être atteints par le transport commercial, les fournitures humanitaires vitales n’ont pas pu atteindre Marioupol. L’OCHA pointe du doigt les contraintes d’accès et de sécurité, qui ont empêché les convois d’aide d’entrer dans la ville encerclée depuis plus d’un mois.

S’agissant de la situation au nord de l’Ukraine, la situation humanitaire dans la ville de Chernihiv continue de se « détériorer rapidement  ». « Les bombardements incessants ont privé d’électricité, de chauffage et de gaz pas moins de 130.000 personnes, soit moins de la moitié de la population d’environ 290.000 habitants avant l’escalade  », selon le rapport d’OCHA.

A noter qu’en 2020, le tiers de la population totale de l’Ukraine était rurale, dont 58% en âge de travailler (entre 16 et 59 ans). Le secteur agricole contribuait pour environ 9,3% au produit intérieur brut et employait près de 17% de la population active. Sur la superficie totale des terres, 68,5% sont agricoles, selon la FAO.