Les agences de l’ONU continuent de tirer la sonnette d’alarme face à la « catastrophe humanitaire » croissante dans le nord de l’Éthiopie, provoquée par le conflit dans la région du Tigré, qui en est à son neuvième mois. La récente escalade des combats à Afar et dans d’autres régions voisines a été désastreuse pour les enfants, a déclaré la Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Henrietta Fore, dans un communiqué cette semaine.
Des personnes déplacées tuées
L’UNICEF est extrêmement alarmé par les informations faisant état de la mort, jeudi dernier, de plus de 200 personnes, dont plus de 100 enfants, lors d’attaques contre des familles déplacées ayant trouvé refuge dans un centre de santé et une école à Afar. Mme Fore a ajouté que des vivres essentiels auraient également été détruits dans une région qui connaît déjà une malnutrition et une insécurité alimentaire à des niveaux d’urgence.
« L’intensification des combats à Afar et dans d’autres régions voisines du Tigré est désastreuse pour les enfants. Elle fait suite à des mois de conflit armé dans le Tigré qui ont placé quelque 400.000 personnes, dont au moins 160.000 enfants, dans des conditions proches de la famine », a-t-elle déclaré.
Un cessez-le-feu humanitaire est nécessaire
Quelque quatre millions de personnes sont en situation de crise ou d’urgence en matière d’insécurité alimentaire dans le Tigré et les régions voisines d’Afar et d’Amhara. Les récents combats ont déplacé 100.000 personnes supplémentaires, s’ajoutant ainsi aux deux millions qui ont déjà fui leur foyer. L’UNICEF estime en outre que le nombre d’enfants du Tigré souffrant de malnutrition potentiellement mortelle sera multiplié par 10 au cours des 12 prochains mois.
« La catastrophe humanitaire qui se propage dans le nord de l’Éthiopie est due au conflit armé et ne peut être résolue que par les parties au conflit », a déclaré Mme Fore. « L’UNICEF appelle toutes les parties à mettre fin aux combats et à mettre en œuvre un cessez-le-feu humanitaire immédiat. Par-dessus tout, nous demandons à toutes les parties de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour protéger les enfants ».
Répondre aux besoins dans un contexte de conflit
Malgré de nombreux défis, le Programme alimentaire mondial (PAM) a livré de la nourriture à plus d’un million de personnes dans le nord-ouest et dans certaines parties du sud du Tigré en juin et juillet. Cependant, le PAM n’a atteint que la moitié des personnes qu’il avait prévu d’aider, y compris les communautés au bord de la famine, en raison de graves pénuries de nourriture, d’argent, de carburant et d’équipements de télécommunications en état de marche.
Le PAM a indiqué que plus de 175 camions sont arrivés dans la région du Tigré au cours de la première semaine de ce mois, dont 90 transportant une aide alimentaire vitale. 90 autres camions devraient arriver dans les jours à venir. Cependant, comme 5,2 millions de personnes ont besoin d’une aide alimentaire, soit environ 90% de la population, le PAM et ses partenaires ont besoin qu’au moins 100 camions arrivent chaque jour pour leur venir en aide.
Michael Dunford, Directeur de l’intervention du PAM pour le Tigré, a également lancé un appel au cessez-le-feu afin que la nourriture et les autres fournitures d’urgence puissent être livrées avant qu’il ne soit trop tard. « Les habitants du Tigré souffrent du manque d’aide humanitaire depuis un mois - nous devons les atteindre maintenant avant qu’ils ne sombrent dans la famine », a-t-il averti.
« D’autres personnes dans les régions voisines sont également en train de sombrer dans la famine à cause du conflit et le PAM travaille avec le gouvernement pour fournir aux communautés d’Afar et d’Amhara des aliments vitaux dès que possible », a-t-il ajouté.
Accès rétabli aux camps abritant des réfugiés érythréens
L’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et ses partenaires ont annoncé mardi qu’ils avaient retrouvé l’accès aux camps de Mai Aini et d’Adi Harush pour les réfugiés érythréens au Tigré. De violents affrontements dans la région avaient empêché le personnel du HCR d’accéder à ces camps depuis le 13 juillet. La livraison de l’aide d’urgence a repris le 5 août pour les 23.000 réfugiés qui se trouvent dans les deux camps.
Cependant, l’accès demeure limité du fait de la situation sécuritaire complexe et instable et les réfugiés continuent de faire face à des conditions de vie difficiles, signale le HCR. Les services essentiels tels que les soins de santé ne sont toujours pas assurés et l’eau potable se raréfie.
Le HCR demande un passage sûr, ce qui permettra aux réfugiés de Mai Aini et d’Adi Harush d’être transférés vers le nouveau site d’Alemwach, près de la ville de Dabat, à environ 135 kilomètres. Un premier groupe de 126 réfugiés a été relocalisé dans des dans des abris communautaires d’urgence à Dabat et ils reçoivent une assistance.
Au cours de la semaine dernière, l’accès humanitaire au Tigré s’est amélioré et le personnel du HCR ainsi que 12 camions transportant du matériel de secours ont rejoint Mekele, le chef-lieu de la région.
L’accès sans entrave au Tigré et à l’ensemble de la région doit être garanti par toutes les parties au conflit, afin de permettre au HCR et à ses partenaires de fournir et d’intensifier l’aide humanitaire et les prestations de protection nécessaires à des dizaines de milliers de personnes ayant un besoin urgent de soutien, affirme l’agence onusienne.
Le HCR a par ailleurs lancé un appel de fonds d’un montant de 164,5 millions de dollars pour aider 96.000 réfugiés érythréens et 650.000 déplacés internes au Tigré et jusqu’à 120.000 réfugiés éthiopiens dans l’est du Soudan.
Une part de 101,3 millions de dollars, soit 61% de l’appel de fonds, permettra de fournir une aide essentielle telle que des abris, des articles ménagers et des prestations de protection, y compris un soutien aux victimes de violences sexistes, dans la région du Tigré.