Le patron de l’ONU appelle le Conseil de sécurité à tout faire pour mettre fin à la guerre en Ukraine


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Près de six semaines après le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le Conseil de sécurité de l’ONU s’est réuni mardi pour le faire le point sur la situation, une réunion à laquelle était invité le Président ukrainien Volodymyr Zelensky par visioconférence.

« Je n’oublierai jamais les images terrifiantes de civils tués à Boutcha. J’ai immédiatement appelé à une enquête indépendante pour garantir une reddition des comptes effective », a déclaré le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres , devant les membres du Conseil, en référence aux images des corps gisant dans la ville ukrainienne de Boutcha, découverts après le retrait de troupes russes.

« Je suis également profondément choqué par les témoignages personnels de viols et de violences sexuelles qui émergent actuellement  », a-t-il ajouté. « La Haute-Commissaire aux droits de l’homme a évoqué d’éventuels crimes de guerre, de graves violations du droit international humanitaire et de graves violations du droit international des droits de l’homme  ». 

Le chef de l’ONU a décrit la crise ukrainienne, provoquée par l’invasion russe, comme « l’un des plus grands défis jamais lancés à l’ordre international et à l’architecture de paix mondiale, fondée sur la Charte des Nations Unies ».

À ce jour, l’offensive russe a déplacé plus de 10 millions de personnes en un mois seulement, le mouvement de population forcé le plus rapide depuis la Seconde Guerre mondiale, a déclaré M. Guterres. Sur ce nombre, plus de 4,2 millions ont franchi les frontières de l’Ukraine, selon l’agence des Nations Unies pour les réfugiés, le HCR .

Compte tenu de l’urgence de la situation, le chef de l’ONU a expliqué qu’il avait chargé le Coordinateur des secours d’urgence de l’ONU, Martin Griffiths, de se rendre en Russie et en Ukraine pour obtenir un cessez-le-feu humanitaire immédiat.

Impact de la guerre sur les pays en développement

M. Guterres a ajouté qu’au-delà des frontières de l’Ukraine et en particulier dans les pays en développement, la perturbation des chaînes d’approvisionnement mondiales causée par la guerre a entraîné des hausses massives des prix des aliments, de l’énergie et des engrais, la Russie et l’Ukraine faisant partie des principaux producteurs mondiaux.

« Rien qu’au cours du mois dernier, les prix du blé ont augmenté de 22%, ceux du maïs de 21% et ceux de l’orge de 31% », a déclaré le Secrétaire général, avant de noter avec inquiétude que 74 pays en développement avec une population totale de 1,2 milliard d’habitants étaient « particulièrement vulnérables  » à la flambée des prix des aliments, de l’énergie et des engrais.

Le chef de l’ONU a également averti que les remboursements de la dette représentent désormais 16% des recettes d’exportation des pays en développement, tandis que le fardeau est deux fois plus élevé pour les petits États insulaires en développement, en raison de la hausse des taux d’intérêt et des importations coûteuses. Selon M. Guterres, avec tous les signaux d’alerte qui clignotent au rouge, « nous avons le devoir d’agir  ».

Il a noté que le Groupe mondial de réponse à la crise sur l’alimentation, l’énergie et la finance qu’il a créé le mois dernier a formulé quelques recommandations initiales à l’intention des États membres et des institutions financières internationales.

« En ce qui concerne l’alimentation, nous exhortons tous les pays à maintenir les marchés ouverts, à résister aux restrictions à l’exportation injustifiées et inutiles et à mettre des réserves à la disposition des pays menacés par la faim et la famine. L’heure n’est pas au protectionnisme », a-t-il souligné. « Les appels humanitaires doivent être entièrement financés. Les gens pris dans des crises partout dans le monde ne peuvent pas payer le prix de cette guerre  », a-t-il ajouté.

Concernant l’énergie, le chef de l’ONU a estimé que l’utilisation de stocks stratégiques et de réserves supplémentaires pourrait contribuer à atténuer la crise énergétique à court terme. « Mais la seule solution à moyen et long terme est d’accélérer le déploiement des énergies renouvelables, qui ne sont pas impactées par les fluctuations du marché », a-t-il dit.

Quant à la finance, le Secrétaire général a jugé nécessaire que les institutions financières internationales passent en mode urgence. « Nous avons besoin d’une action urgente de la part du G20 et des institutions financières internationales pour accroître les liquidités et l’espace budgétaire afin que les gouvernements puissent fournir des filets de sécurité aux plus pauvres et aux plus vulnérables », a-t-il dit. « La réforme que j’ai réclamée du système financier mondial est attendue depuis longtemps  ».

Faire cesser la guerre

« La guerre en Ukraine doit cesser – maintenant », a déclaré le Secrétaire général, qui a réclamé des « négociations sérieuses pour la paix, fondées sur les principes de la Charte des Nations Unies ». Il a regretté « profondément les divisions qui ont empêché le Conseil de sécurité d’agir non seulement sur l’Ukraine, mais sur d’autres menaces à la paix et à la sécurité dans le monde  ».

« J’exhorte le Conseil à faire tout ce qui est en son pouvoir pour mettre fin à la guerre et atténuer son impact, tant sur le peuple ukrainien qui souffre que sur les personnes vulnérables et les pays en développement du monde entier  », a-t-il conclu.

Pour sa part, la Secrétaire générale adjointe des Nations Unies aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, Rosemary DiCarlo, a noté devant les membres du Conseil que les efforts diplomatiques pour mettre fin à la guerre se poursuivaient. Elle a félicité le gouvernement turc d’avoir accueilli des pourparlers directs entre les représentants ukrainiens et russes. Tout progrès dans les négociations doit se traduire rapidement en action sur le terrain, a-t-elle souligné.

Le Coordinateur des secours d’urgence, Martin Griffiths, s’est également exprimé lors de la réunion du Conseil de sécurité de ce mardi. Il a déclaré que les civils ukrainiens payaient un prix très élevé pour la guerre, avec au moins 1.430 personnes tuées et quelque 11 millions de personnes forcées de fuir leur foyer. M. Griffiths a indiqué qu’il avait eu des réunions la veille à Moscou, estimant qu’il y avait un long chemin à parcourir. Mercredi, il espère se rendre en Ukraine pour avoir des discussions avec de hauts responsables du gouvernement ukrainien et observer sur le terrain la réponse humanitaire.